ÉDITO !

Le fondement du groupement de plusieurs équipes. Recourir ensemble à notre rencontre avec le public.
On peut se satisfaire du débat sur l’avenir de l'écriture contemporaine, sans pour autant que dans les actes et dans le programme du public soient vraiment promus, et pris, les risques qu'implique l'ouverture à une nouvelle création théâtrale. Les conditions d'accueil sont difficiles, mais nous y cherchons au-delà des difficultés économiques à témoigner par ce groupement, du travail parallèle de plusieurs équipes sur le texte théâtral contemporain. Des points de vue d'auteurs ou démarches artistiques qui parce qu'ils diffèrent, participent ensemble à identifier les nouveaux fondements d'une contre-culture. En ces moments d'urgence pour le spectacle vivant, chercher à la racine des expériences une reconnaissance entre artistes et public, où résiste une nécessité.

Un parcours sur le processus de l'écriture théâtrale. L’identification d'un théâtre de demain, avec ses auteurs, ses acteurs, ses scénographes. Nous ouvrons au public un laboratoire sur une période de 8 mois. Un endroit où les créations sont en mouvement.

Interroger l'au-delà de nos convictions. Découvrir certains textes, certaines approches scéniques qui se situent entre ce que l'on attend du spectaculaire et ce qu'ils nous proposent de singulier. Une utopie ? Une ligne oblique à notre conception actuelle de la représentation. Évènement ou rituel d'un spectacle au centre d'une expérience humaine atypique mais réalisée, qui agit avec insolence et liberté sur le collectif. Afin d'affirmer que le théâtre existe avec cette altérité, cette expérience humaine entre le projet et sa véritable réalisation, premier combat contre et avec la superficialité. Incarner et libérer l’endroit où ça se passe, et pour tous. Le théâtre non comme un lieu de consommation ou de cloisonnement politique. Le théâtre comme espace démocratique en permanente révolution contre lui-même.

Choisir son théâtre, c'est forcément le créer. Ne plus formater l'accès au théâtre contemporain. Éviter les voyages organisés par un message moral. Risquer d'abord avec le public textes inédits, et formes particulières. Vers l’endroit où peut s'imaginer et s'exercer un sens critique. Il faut s'interroger sur le théâtre car il porte beaucoup des mystères de notre histoire. La mémoire ? Mais s'interroger sur l'écriture au théâtre c’est s'interroger aussi sur sa naissance. Où se situe ce prisme social. Ces fondations vivantes du théâtre. Fondations poétiques situées comme des forêts à ces endroits publics eux-mêmes sujets à fluctuations. Il n'y a pas de théâtre "populaire", sans diversité culturelle représentative des minorités.

L’écriture n’est qu’une naissance. L'écriture théâtrale se cherche dans le corps, directement dans le corps. Elle doit s'imposer pour disparaître à chaque mouvement. Par la fiction, agir volontairement sur la réalité comme on utilise un philtre, en n'oubliant pas qu'il déforme énormément la réalité. Références aux mythes, aux histoires pour interroger cette théâtralité qui nous accompagne et dont on essaie parfois de se débarrasser. Dialoguer avec elle, se confronter à la forme et à l'impossibilité de raconter la guerre moderne au théâtre. Mais on peut y voler la transgression qu'il est important d'entendre en nous. Ce que le public et les artistes ne comprennent pas, mais appréhendent ensemble, est nécessaire à toute prise du temps théâtral. En s'imposant ce décalage s'il peut nous procurer la vision. Le décalage dans ce prisme qui vient du commencement. Lancé comme une longue névralgie...
Resituer notre perception d'un monde qui change. Être avec les spectateurs, avec nos propres incapacités tout en poursuivant la réalité du temps théâtral, l’histoire qui dit quelque chose de nous. La guerre fait rage et l'image est désormais le témoin de l'histoire en marche, consignée dans un rapport d'observation des masses. Le mensonge est celui de l'inutilité du parchemin. Le pouvoir enlevé de coucher sa mémoire, son témoignage du mouvement. Le mot est là, nous construit et nous détruit. L’esprit d’entreprendre nous pousse à rencontrer l’effondrement des fondements. Jouer avec ce qu'est la représentation théâtrale, une guerre du langage artistique. Les limites du théâtre repoussées par une technologie en mouvement. Une mémoire à la représentation dans laquelle les acteurs vont puiser, interroger nos propres liens à la parole. La diversité de nos cultures, de nos influences et les constantes contradictoires qui dirigent un homme à l'accomplissement de l’acte. Sur les planches d'un théâtre mystérieux...

 
Gilles Sampieri